lundi 31 janvier 2011

Le Vol

Voici un texte que j'ai écrit suite à une proposition de ma prof de culture antique, sur un thème imposé : "Des dieux et des hommes", pas le droit à plus de 3 pages. Enjoy !




Comme elle est belle...
Des coulées d'or et de cuivre s'échouent sur ses épaules en ondulant. Une peau d'ivoire que le soleil du matin caresse avec délicatesse, un visage ovale se cache à moitié dans une lourde écharpe verte, tandis qu'un bonnet assorti peine à contenir sa formidable crinière.
Le monde est devenu silence, elle enchante tout autour d'elle, assise sur un banc parmi ses amies, entourée mais profondément seule.
Elle est magnifique.
D'une beauté étrangère à ce monde.
Et moi, en retrait, véritablement exclu, cueilli en plein milieu de la cour et du coeur par une vision d'absolu.
La sonnerie retentit. Brise mon rêve.
Elle relève les yeux dans ma direction sans me voir.
Un regard d'ébène. Un regard de nuit. Qui tranche avec la pâleur de sa peau et le feu de sa chevelure. Mon cœur se suspend au-dessus du réel et de l'ère des hommes.
Elle a regardé vers moi une seconde.
Le temps pour elle de se lever, de remettre son sac à l'épaule et de suivre le troupeau de poules piaffantes qui lui servent de camarades de classe.
Elle ne m'a pas vu. Elle ne me voit pas.
Toujours ce silence à travers le bruit continu, une fleur au milieu des épines, une étoile filante dans la nuit.
Elle disparaît dans le bâtiment C. Je viens de perdre sa lumière.
Ce devait être un songe.
Je reste un long moment ahuri, immobile dans mon manteau noir tout neuf, mes chaussures cirées et mon écharpe grise. Mes yeux, bleus comme un ciel nu, se perdent dans le vague.
Un songe.
La deuxième sonnerie retentit.
Ça y est, je suis en retard pour mon premiers cours au lycée Clémenceau.

                                                                             ***



Elle est là.
Je suis à la fenêtre. 
La nuit a enveloppé la voûte céleste et toute la terre. Il fait froid, mais je ne m'en soucie guère. Je suis obnubilé par quelque chose d'autre que la météo. 
Elle. 
Caché sur son petit balcon où je me suis hissé quelques temps après les cours, je l'ai suivie sans qu'elle ne m'ait aperçu.
Elle ne m'a toujours pas vu. Je n'existe toujours pas pour elle. Même si je cherche sans cesse son regard, ses yeux profonds comme des abysses, pour retrouver cet instant magique qui m'a totalement bouleversé.

Elle s'est couchée en travers de son lit, installé dans cette pièce entièrement tapissée de posters et de photos. Des écouteurs dans les oreilles la coupent du monde, elle sert un emballage de chocolat dans la main gauche.
Le bonheur pétille dans mon corps, une ébullition de désirs et de sentiments émus m'étreignent avec violence.
Il faut que j'entre.
Que je lui avoue ce qui bout en moi depuis quelques jours, depuis que je l'ai vue, depuis que j'ai découvert ma déesse.
J'oublie toutes ces règles sociales dont on m'a parlé.
Il faut que je m'approche, que je la touche, pour me dire que c'est réel, que je ne rêve pas pendant qu'elle dort.
Je caresse la poignée de la porte-fenêtre. Elle se plie à ma demande et m'ouvre un passage vers la chambre.
J'inspire douloureusement.
J'entre et referme derrière moi.
Seule la lampe de chevet l'éclaire, comme le petit soleil de ce matin-là. Je m'approche en tremblant. La musique de son baladeur créer un bruit de fond agréable, elle écoute un orchestre philharmonique jouant un morceau vieux de plusieurs siècles qui est pourtant resté un hymne intemporel.
Endormie, elle respire la beauté et la paix.
Sa peau est aussi douce que je ne l'imaginais, ses cheveux encore plus brillant que dans mon souvenir et sa bouche, rose et ferme, me chuchote un baiser sans que ses yeux ne soient encore ouverts.
Elle ne m'a pas senti entrer. Elle est prisonnière du sommeil et moi je suis pétrifié à son chevet.
Elle respire lentement, et un de mes doigts ose s'échapper vers la courbe de sa joue, mon visage se penche...
Un goût que je lui vole.
Un effluve de chocolat.
Une rencontre de silences.
Mes lèvres sur les siennes.
J'oublie qui je suis. J'oublie d'où je viens.
La sensation s'efface peu à peu. Je me détache. J'ouvre les yeux à nouveau, tentant de savourer le plus longtemps possible ces derniers instants.
Elle me regarde.
J'existe. Enfin.
Elle s'est réveillée.
Regard de nuit. Regard de peur.
C'est moi qui sursaute.
C'est elle qui se met à crier.
Je m'enfuis.
Elle se relève d'un coup et me poursuit jusqu'au balcon. Je saute sans réfléchir.
Huit étages s'ouvrent à moi. Le vide et le ciel.
J'ouvre les bras. Le vent m'accueille en son sein et me soutient. Je m'arrête en cours de route.
En suspens.
Je vole.
Je vole et je me retourne vers elle, debout dans l'air.
Elle me regarde.
Un immortel face à une Fille d’Ève. 
Moi si loin d'elle. Venant d'un autre monde. Pour goûter au sien quelques jours.
Sa bouche est déformée par des mots d'incompréhension qu'elle n'arrive pas à prononcer.
C'est un demi échec.
Elle ne pourra jamais dire ce qu'elle a vécu.
Et moi, je repars, sans son regard.
Une saveur de chocolat sur les lèvres et dans le coeur.





EDIT : j'ai beau essayer d'arranger ça, la taille change selon son envie et l'une des dernières phrases a carrément changé de police Oo ... Désolée ^^"

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire