lundi 16 janvier 2012

- Lettre de la Princesse au Dragon 6 -



Cher Dragon,

Ta lettre est arrivée juste à temps pour me donner l'assurance qu'il me manquait pour faire le pas vers la liberté. Pour cela, tu auras à jamais toute ma reconnaissance. Mais avant de te raconter ce qu'il vient de m'arriver, je vais répondre à tout ce que tu as écrit...
Pour ce qui est du lien entre nos deux esprits, je sais que j'y suis pour quelque chose : j'avais et j'ai encore tellement besoin d'un ami qui me donnerait les moyens de réaliser mes rêves, d'être à mes côtés et m'offrir un goût d'évasion, que j'ai cherché à rester auprès de ta conscience, cher Dragon. Et si je suis malcontreusement devenue spectatrice de certains de tes souvenirs que tu aurais voulu garder pour toi, je te fais toutes mes plates excuses, bien que cela, je n'ai pas cherché à le déclencher, comme je te l'avais dit dans ma précédente lettre... L'amour pour cette humaine a été projeté sous mes yeux sans que je n'ai eu à demander quoi que soit. Enfin, tout de même, je te demande pardon.
Je suis tellement désolée que cette relation non aboutie t'aie poussé à te retirer, néanmoins je comprends tout à fait ta réaction, qui me semble légitime. C'est vrai avec n'importe qui : nous ne pouvons pas savoir à l'avance si nous pouvons nous attacher à l'autre, c'est à lui de nous prouver qu'il est digne de notre confiance. Et à travers toutes tes lettres, tu m'as prouvé à quel point je pouvais me fier à toi.
Tu as mangé le prince charmant ?!
Mais... Mais...
Enfin non, c'est dans l'ordre des choses, il ne méritait pas qu'on s'attarde sur lui et si tu avais faim, il aura au moins servit à quelque chose dans sa vie (ou dans sa mort...). Pour ce qui est de la digestion, je suis bien consciente qu'une armure en acier ne doit pas être très conseillée, même pour des intestins de Dragon... Laisse-moi te conseiller de manger quelques fleurs que l'on nomme pensées bleues, elles te faciliteront le transit intestinal, enfin, ce n'est qu'une proposition !
Oh, c'est tellement gentil de ta part... Vraiment, suis-je capable de produire de tels effets sur ton coeur ? Je ne pensais pas pouvoir te faire ce bien que tu décris ... Moi aussi, cher Dragon, il faut que je t'avoue qu'à chaque fois que je reçois l'une des lettres, j'ai un petit picotement au niveau du ventre, je suis prise d'un élan de gaieté incontrôlable et je finis par passer pour une petite Princesse de douze ans qui serait encore coiffée de couettes à ma manière de trépigner dans tous les sens... :$
Oui, lorsque je l'ai fait, j'ai senti tout ton esprit autour de moi et cela m'a protégée. Je vais bientôt te raconter ce que j'ai fait, mon Dragon.
Je me suis tellement posé les questions que tu as soulevé ! Serais-je capable d'un tel acte et d'en assumer les conséquences ? Ne serais-je qu'une potiche qui pleure après des rêves dont elle ne pourrait pas supporter la réalité s'ils venaient à se réaliser ? Puis, j'ai regardé mes servantes et mes pages des jours durant dans leurs tâches peu enviables, et pourtant, je ne peux pas nier qu'ils semblent plus heureux que moi. Ils vivent, ils ont des amis, des moments de peine ou de joie à partager, et cela, je ne pourrais jamais le trouver entre ces murs.
Tu es désormais l'une de mes plus belles raisons de mettre en oeuvre mon voyage vers le monde, Dragon ! Oui, c'est avec toi que je veux découvrir le dehors, c'est à tes côtés que je veux vivre cette aventure. Qui de mieux qu'un Dragon comme guide et protecteur ? Car je ne me fais pas non plus d'illusions, même si je souhaite devenir autonome et apprendre à me battre, il me faudra pour cela un certain temps et durant celui-ci, je sais que je ne craindrais rien sous ton aile.
Tu ne prétends rien et c'est ce qui fait tout ton mérite, mon cher ! Voilà bien toute la différence entre toi et ces mâles stupides et orgueilleux ! Non, je ne supporterais plus la vue d'un seul nouveau prétendant.
Oui, il était temps que je sorte ...
Oh, si je me souviens de cette étoile filante... Etait-ce bien toi ? Vraiment ? Oh... Alors... Alors... Le voeu que j'avais fait en la voyant, c'est elle-même qui l'a rendu réel... :)
Maintenant, mon cher Dragon, laisse-moi te rapporter ce qui vient de m'arriver...
C'était la nuit dernière, alors qu'elle était fraîche et douce, que la musique est venue à moi. Elle s'est glissée dans mon oreille et a résonné le son de tams-tams et celui d'une voix masculine qui chantait dans une langue inconnue, mélodieuse, enchanteresse, magique.
La musique a vibré en moi comme un appel impérieux, m'entraînant à l'éveil, à ouvrir ma fenêtre et respirer à plein poumons l'air astral. C'était si fort, mon Dragon, plus fort que moi, le monde m'appelait, m'attirait à lui, en me soufflant que j'en étais capable.
J'ai rassemblé toutes tes lettres dans une boîte en sapin, pris quelques provisions que l'on me laisse dans mes appartements, aie enfilé une lourde cape sombre, pour finalement me diriger vers la porte.
C'était décidé.
J'allais te rejoindre, découvrir le monde et vivre !
Et la chanson continuait, se prolongeait en mon coeur, à l'écoute des notes gorgées d'une nouvelle aurore.
J'ai descendu les escaliers en colimaçon sans un bruit, suis arrivée devant un portail protégé par deux gardes aux traits déjà assoupis. Oui, il faut que je te l'avoue cher Dragon, j'ai quelques autres pouvoirs sous la main, dont celui de pousser les gens au sommeil. Certains se moquaient en disant que j'étais peut-être trop ennuyante, mais ils ne pouvaient pas se rendre compte de toutes les possibilités que cela m'offre dans de telles circonstances !
Je me suis donc dissimulée dans l'ombre du Palais de mon père le Roi, ai passé la salle d'apparat, et me suis enfin retrouvée sous l'immense porche de cristal qui fait office d'entrée. A chaque pas, je me remémorais l'une de tes lettres. Chaque mot était un bouclier face à mes angoisses, et ta présence, bien que seulement spirituelle encore, m'entourait.
J'ai laissé mes quasi geôliers tomber comme des mouches à mon passage, me laissant libre de suivre ma voie à travers la nuit étoilée. Mon coeur tremblait, je peinais parfois à respirer, mais quel bonheur, oh, cher Dragon, quelle sensation unique que de se voir prendre la victoire sur sa peur...
La musique m'a guidée jusqu'au bout, me transmettant des ondes douces, qui m'ont tenu chaud et rassurée.
Je suis arrivée dans les rues de la capitale, le dalage du sol, les odeurs de marchandises ou des habitants dormant tous profondément, le bruit de quelques chevaux renâclant dans leur enclos, et celui de fontaines éparpillées sur les places.
Ce n'était que le début, mais le monde m'était enfin ouvert !
J'étais libre.
Libre de vivre ma vie, et de te rencontrer !
Je me suis même permise de pousser un cri qui s'est élevé dans le ciel, je ne risquais rien, les seuls qui auraient pu m'apporter des ennuis étaient plongés dans un profond sommeil !
Maintenant que j'ai pu sortir de la capitale, j'ai trouvé une petite auberge dont j'ai occupé la chambre pour le reste de la nuit. Mais cela a été impossible de fermer l'oeil. Comment aurais-je pu dormir ? J'étais enfin dehors... Oui, les draps n'avaient pas les senteurs de fleurs cueillies le matin même pour moi, les murs suaient à certains endroits, le parquet grinçait sous mes pieds et je ne disposait que d'une seule petite fenêtre aux carreaux usés, mais j'étais là, en dehors de cette maudite Tour !!!
Et la musique, tourbillonnante et émanant de je ne sais quel lieu, s'est éteinte lentement en moi, m'assurant qu'elle était venue me conduire jusque là.
Oh mon Dragon, comme tu avais raison...
J'ai bien fait de suivre ton conseil.
Je me suis assoupie et me suis réveillée sous les coups de midi ! Oh, quelle liberté, cela n'existe pas au château ! Ma première grace matinée, le crois-tu ?
Cependant, je dois faire attention désormais, l'alerte a été donnée, et il me faut te retrouver au plus vite, je ne veux pas être reprise...
Je sens que ton esprit n'est pas loin de moi, mais je ne saurais le localiser précisément... Je n'ose te demander de venir me chercher, j'essaierai de me débrouiller selon mes moyens.
Je suis aujourd'hui en train de marcher dans une plaine, une de celles que j'ai longtemps observé de ma fenêtre... J'ai senti l'herbe, l'herbe, mon Dragon ! Oh... Tu dois me prendre pour une folle... Mais c'est tellement nouveau pour moi tout cela... Je ne peux pas même imaginer ce que je vais ressentir lorsque je te verras en chair et en os... Je vais sûrement trembler de tout mon corps...
Pourtant, j'attends plus que tout ce jour où mes yeux pourront afin se poser sur toi !
J'ai hâte. Tellement.
Je t'écris sur le bord d'un chemin, je pense que j'irais me réfugier dans la forêt, j'ai acheté au village de quoi tenir quelques jours, ensuite, nous aviserons...
Ah, si mon père me voyait ! Seule, dans le monde, à marcher et à chanter sa joie !
Tu m'avais manqué, mon Dragon, je suis heureuse que tu sois la première personne chère à mon coeur que je puisse toucher enfin.
Je t'attends, cher Dragon. Dis-moi ce que je dois faire pour te retrouver.

Je te fais de doux baisers et les prochains j'espère seront réels !

Ta Princesse, à la campagne.

PS : Merci pour ce tour il est extrêmement pratique ! Il n'est pas très compliqué, j'utilise le même moyen pour te faire parvenir cette lettre. Il faudra que je mette le royaume des Elfes dans la liste des endroits à visiter !

PSS : Oh, quelle belle légende. Je veux bien y croire. Mais mon cher Dragon, rassures-moi, tu ne comptes aller retrouver ta reine bientôt, n'est-ce pas ?

PSSS : J'ai retrouvé un cercle de terre carbonisé... C'est bizarre, j'ai ri. Il y en a un qui a dû moins apprécier mais, au moins je sais que je suis sur la bonne route. Dis, Dragon, ça ressemblerait à quoi une fête, chez vous ? Carbonisation à volonté de princes en vadrouille ? x)



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